Puerto Rico Earthship Build Programme 2018 : on y était !

Earthship, Michael Reynolds, ça vous parle ? Biotecture Planet Earth, association américaine dont le but est de promouvoir le mouvement Earthship lancé par Michael Reynolds, architecte hippie et controversé, nous a accueilli pendant une journée sur son chantier participatif à Aguada, sur le terrain de Carlos Chaparro, un ami de Clint.

Ce mouvement a pour vocation de former des volontaires internationaux et locaux à la construction de bâtiments, les Earthships, dans des régions dévastées par des catastrophes naturelles, en se basant sur 6 piliers :

  • Utilisation de matériaux de récupération (nombreux à la suite de catastrophes)
  • Régulation thermique du bâtiment grâce au système de murs de masse et de ventilation naturelle pour le confort des habitants
  • Utilisation d’énergie solaire et éolienne pour la production d’énergie
  • Collecte et filtrage d’eau de pluie pour l’eau potable et domestique
  • Traitement des eaux grises par un système écologique et autosuffisant
  • Production de nourriture pour les habitants vivant au sein de la construction

 

De nombreux modèles de Earthships, plus ou moins fonctionnels, ont été réalisés dans le monde entier et en grande partie à Taos dans l’État du Nouveau Mexique aux États-Unis, fief de Michael Reynolds et de sa communauté.

Cette journée de formation nous a permis de nous initier à la construction d’un Earthship “Apollo”, modèle réalisé à plusieures reprises notamment après le tremblement de terre d’Haïti en 2006. Ici, à Aguada, Puerto Rico, devrait prendre vie un centre communautaire et de formation aux techniques “earthship”.

Les méthodes de construction que nous avons pu voir et auxquelles nous avons participé, ne nous permettent pas de nous lancer tous seuls dans la construction d’un Earthship mais nous apportent un vague aperçu et surtout des pistes de réflexion sur l’utilisation de matériaux de récupération.

 

Les fondations

Il n’y a, à proprement parler, pas de fondations. Le sol est seulement nivelé et tassé avant d’accueillir les murs. D’après l’expérience Earthship, le diamètre des pneus et la construction en cercle suffisent à donner une stabilité suffisante au bâtiment (j’imagine qu’il faut tout de même faire attention au type de sol, et peut-être mener une analyse poussée pour assurer une construction pérenne). De plus, malgré un climat tropical pouvant entraîner de fortes pluies, il n’y a eu aucun système de drainage de prévu. Je ne remets pas forcément en cause les techniques employées mais je regrette de n’avoir pas pu glaner plus d’informations à ce sujet.

Les murs (étape 1)

Les murs des Earthship Apollo sont fabriqués à partir d’une base en pneu. Ils ont tous été récupérés pour leur donner une nouvelle vie. Leur épaisseur n’est pas toujours la même, un tri a donc été effectué avant de commencer. La construction étant en cercle, chaque rangée de pneu doit avoir la même hauteur. La première rangée au contact du sol reçoit comme frein capillaire un polyane (du film plastique) : celui-ci est disposé au fond du pneu pour empêcher la terre de sortir et que l’eau remonte dans les murs. Le rayon du Earthship est de 2 mètres, le centre de la construction est marqué par un fer à béton planté dans le sol. Détail sympathique et malin, tous les fers à béton plantés dans le sol sur le chantier sont couverts d’une canette afin de mieux les voir et éviter de se faire mal. Une fois chaque pneu bien placé et de niveau, ils sont remplis de terre tassée à la masse. Il faut compter une demie-heure pour un pneu. C’est une tâche éreintante qui nécessite un grand nombre de volontaires vu la quantité de pneus à remplir : il y a ceux qui creusent et remplissent les seaux de terre, ceux qui les transportent et les versent dans les pneus et enfin ceux qui tassent. Il faut faire attention à ce que les pneus soient remplis de la même manière pour garder la même épaisseur. Etant plus d’une soixantaine de volontaires sur le chantier, plus Brett qui compte pour 10 (#increvable), un groupe a pu s’attaquer aux étages de pneus suivants avant même que les précédents soient finis. Les pneus supérieurs doivent alors se placer à cheval entre les deux de la rangée inférieure comme dans un mur en pierre, parpaing, brique, kapla, lego ou autres trucs à empiler. Très régulièrement, l’équipe qui supervise tout ce beau monde vérifie que la distance entre le mur et le centre est respectée afin que les murs soient les plus verticaux possible ou légèrement rentrants. L’utilisation d’un fil à plomb se révèle être une aide précieuse pour l’accomplissement de cette tâche. Dès la deuxième rangée, les pneus sont uniquement tapissés de deux morceaux de cartons pour retenir la terre. Hop, un déchet de plus récupéré !

Au niveau des ouvertures telles que la porte ou les fenêtres, il faut arrêter les pneus en escalier. On marque alors l’emplacement de la porte de manière plus précise en enfonçant 4 fers à béton dans la première rangée de pneus, là où viendra le dormant.

Le dormant de la porte

On commence par dessiner la forme de la porte avec des fers à béton plantés verticalement et régulièrement dans le sol. Ceux-ci ne serviront que de support à la construction, ils resteront dans le sol. L’étape suivante consiste à tordre et à fixer, sur les piquets verticaux plantés précédemment, d’autres fers à béton plus longs qui forment le dormant. Ils sont fixés ensemble à l’horizontale à l’aide d’un fil de fer que l’on torsade avec une pince et en faisant bras de levier entre chaque tour pour bien serrer le tout. Afin de réaliser une porte bien plane, les volontaires utilisent un niveau à bulle.

Pour récapituler, le dormant de la porte se compose de deux arches constituant l’épaisseur de la porte, chacune fabriquée à partir de 3 fers à béton: deux pour les montants et 1 pour le sommet en demi cercle. À cela il faut ajouter tous les 20 centimètres autant de traverses verticales que nécessaire pour fixer les deux arches ensemble. Ces traverses verticales maintiendront l’épaisseur régulière de la porte.

Quand la porte est prête, il suffit de la détacher des supports plantés dans le sol et l’amener à son emplacement final dans le Earthship.

Les briques de verre

Les briques de verre sont fabriquées à partir de vieilles bouteilles ou bocaux qui sont coupés en deux avec une machine à découper le carrelage afin de retirer le goulot et uniquement conserver les parties rectilignes. Le goulot ou la partie non utilisée sont mis de côté et broyés pour être réutilisés dans les murs et ainsi utiliser moins de liant (béton). Une fois les morceaux coupés et triés, ils sont bien nettoyés à l’aide d’un chiffon imprégné de produit lave-vitre. Ça doit briller ! En effet, la lumière doit bien passer au travers. Enfin vient l’étape de l’assemblage qui suppose de scotcher ensemble les culs de bouteille de même diamètre. Attention à respecter la règle des couleurs : un des culs de bouteille doit toujours être en verre blanc afin que la brique ne soit pas trop foncée et laisse bien passer la lumière.

Les murs (étape 2)

L’ouverture entre les pneus et le dormant de la porte est comblée par des briques de verre et un liant, ici du béton. Cependant, il est également possible d’utiliser un mélange de terre-paille. Pour aider le béton à adhérer aux pneux on y aura préalablement fixé des vis. Pour combler les creux des pneus côté intérieur et extérieur des murs, la procédure est la même, on place une bouteille ou une canette dans le creux que l’on colmate avec du liant. C’est une façon d’économiser de la matière en échange de l’utilisation d’un déchet.

La hauteur des murs était, dans notre cas, d’environ 2,5 mètres, soit une dizaine de rangées.

Au sommet du mur, une série de fourches réalisées en fer à béton sont plantées tous les 50 centimètres. Elles serviront à accueillir le dôme.

Le Dôme

Le dôme forme la toiture du bâtiment. Il est constitué d’une armature en fer à béton ayant comme clé de voûte un hexagone en bois.

Premièrement, on détermine un centre et son cercle, ici de rayon 190 centimètres. Sur la périphérie on plante des fers à béton comme pour la porte, ils seront notre support de construction. Grâce à ceux-ci, nous pouvons réaliser la ceinture du dôme en tordant et reliant les fers à béton entre eux avec du fil de fer. La ceinture doit être fixée de niveau sur les fers à béton verticaux plantés préalablement dans le sol. Au centre de ce cercle on dispose 4 montants en bois permettant de soutenir l’hexagone en bois à la bonne hauteur. Par la suite, on fixe un fer à béton tordu au préalable sur chaque côté de l’hexagone grâce à des “crampillons”. Pour tordre les fers à béton, une des extrémités doit être placée sous un poids lourd tandis qu’avec la force des bras, un quart ou un demi-cercle est formé. Ces fers à béton sont fixés à la ceinture grâce à des équerres de 30cm par 30cm elles-même en fer à béton. Au fur et à mesure, le dôme se dessine. Les creux qui apparaissent dans l’armature sont comblés en ajoutant des fers à béton partant perpendiculairement du milieu du côté de l’hexagone et attachés à l’aide d’équerres en partie haute et en partie basse. Enfin, pour être finalisé, le dôme est recouvert de grillage afin de recevoir plus tard du béton. À ce moment là, le chantier s’est arrêté, réquisitionnant tous les volontaires pour soulever, transporter et poser le dôme au sommet du earthship en construction sur les fourches prévues à cet effet. Encore une fois, le fil de fer est notre plus fidèle serviteur, servant à lier l’ensemble de la structure.

Pour ceux qui ont suivi notre charabia, vous aurez remarqué qu’il reste un trou au sommet du dôme où se trouve l’hexagone en bois. Celui-ci doit être recouvert par un autre dôme plus petit qui sera surélevé par rapport au grand, permettant ainsi une aération naturelle, bienvenue dans ces contrées chaudes.

Les murs (étape 3)

Afin de garantir davantage de fraîcheur Michael Reynolds a prévu un deuxième mur en béton et brique de verre/canettes à l’extérieur du premier. Il est écarté d’une trentaine de centimètres de celui-ci. Cette tranchée sera remplie de déchets plastiques, canettes et autres servant d’isolant.

Voilà donc toutes les indications que nous avons pu recueillir durant cette journée riche d’enseignement et en travail physique, l’une de celles où nous avons appris le plus en constructions alternatives pour le moment. Malheureusement, nous n’avons pas pu finir la construction et ainsi participer à tout le processus, néanmoins nous avons pu toucher du doigt le concept de fabrication avec des matériaux de recyclage.

4 réflexions au sujet de « Puerto Rico Earthship Build Programme 2018 : on y était ! »

  1. On se chauffe comment en hiver dedans ? Je n’imagine pas trop un feu (l’aération n’a pas l’air suffisante ?).
    Est-ce qu’on peut appliquer le même modèle dans des pays moins chauds ?

    1. Le problème du chauffage ne se pose pas vraiment à Puerto Rico, on y était en hiver si tu veux tout savoir! Il y a d’autres modèles fermés pour des pays moins chauds. Le premier concept de earthship est semi enterré (la terre servant d’isolant) et l’autre côté est fermé par une serre. Elle permet de chauffer la maison, de faire pousser de la nourriture et de phytoépuration pour les eaux grises (à priori il n’y a pas d’eaux noires dans ce genre de construction en raison de l’utilisation de toilettes sèches). La présence d’un puits canadien et d’ouvertures contrôlées dans la serre permettent de réguler la température en été car ça peut être un problème aussi. Il suffit de taper earthship sur internet (images) pour trouver plusieurs plans explicatifs montrant aussi la récupération d’eau de pluie, la filtration, et la gestion de l’énergie solaire. Pour info des earthships existent déjà en France.

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